Alsace-Lorraine entre la France et l’Allemagne, 1871-1914
L’Alsace-Lorraine, un amalgame géopolitique composé des anciens départements français du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, a été annexée par l’Empire allemand nouvellement unifié après sa victoire sur la France en 1871. Le changement de nationalité, l’imposition de politiques de germanisation et l’arrivée de 120 000 colons allemands dans le soi-disant Reichsland (« terre impériale”) avaient d’abord été opposés par les notables locaux et les chefs religieux qui s’accrochaient à l’espoir que la France récupérerait un jour ses « provinces perdues”., Les élites francophiles continuent à promouvoir la culture et la langue françaises sous couvert de régionalisme alsacien, mais en 1914, la plupart des quelque 1,9 million d’habitants de la région se résignent à leur sort. L’Alsace-Lorraine avait été relativement bien intégrée à l’Empire allemand, et une nouvelle constitution en 1911 lui avait accordé plus d’autonomie, bien que des tensions aient éclaté en 1913 lors de la tristement célèbre affaire de Zabern.
Une frontière en guerre
Soldats
En général, la guerre est accueillie en Alsace-Lorraine avec indifférence., Néanmoins, près de 380 000 Alsaciens et Lorrains se sont battus pour l’Allemagne. Ces recrues ont tendance à être considérées avec suspicion par le Haut Commandement allemand, qui décide en mars 1915, après une vague de désertions, que les soldats d’Alsace-Lorraine serviront dans l’intérieur allemand ou, plus généralement, sur le Front de l’Est ou dans la marine. Les taux de désertion sont restés relativement élevés. Des milliers d’hommes d’Alsace-Lorraine ont fui en Suisse et en France, et environ 17 500 se sont portés volontaires dans l’armée française.
Champs de bataille
Plusieurs offensives militaires majeures ont eu lieu dans la région., Les batailles de Sarrebourg et de Morhange détruisent une partie de la Lorraine à la mi-août 1914. Plus tôt dans le mois, les troupes françaises avaient pris Mulhouse, mais avaient été repoussées par une contre-offensive allemande à la fin du mois d’août. Les Français maintinrent néanmoins un pied en Alsace pendant toute la durée de la guerre. En 1915, les Vosges ont été le site des batailles particulièrement brutales de Hartmannswillerkopf et du Linge, qui est devenu le site d’un grand mémorial de guerre français, musée et cimetière.,
Front intérieur
Comme le reste de l’Empire allemand, le front intérieur de l’Alsace-Lorraine a connu de grandes difficultés et privations, notamment la loi martiale, les pénuries alimentaires et le rationnement. Dans les zones situées à proximité relative des zones de combat, des propriétés privées ont été réquisitionnées, des forêts et des vignobles ont été détruits pour installer des fortifications et les résidents locaux ont été évacués. Des milliers de réfugiés sont arrivés à Strasbourg. En 1917, les civils dans les centres urbains souffraient d’un manque de produits de première nécessité, une situation qui a permis à la grippe espagnole de faire des ravages un an plus tard., Le chômage et l’inflation ont également dévasté la région. La plupart des usines ont été déplacées à l’intérieur de l’Allemagne, les investissements dans l’industrie locale se sont taris et le capital restant a été transféré dans la production militaire. L’emploi féminin a été particulièrement touché par l’effondrement de la production textile, ce qui a incité les Alsaciennes de la classe ouvrière à s’installer dans d’autres parties du Reich pour travailler dans des usines de munitions.
les tensions Ethniques dans la région exacerbé locale mécontentement., Bien que les hommes et les femmes travaillent sans relâche à l’effort de guerre, les craintes allemandes de déloyauté et de trahison s’étendent à la population civile d’Alsace-Lorraine. Les politiques de germanisation ont été revigorées, avec le gouverneur Johann von Dallwitz (1855-1919) déclarant en 1914 qu’un « balai de fer” éliminerait le sentiment anti-allemand de la région. L’usage de la langue française a été interdit. Des milliers d’habitants furent emprisonnés pour diverses infractions, qu’il s’agisse de chanter la Marseillaise ou de porter une cocarde, de répandre de fausses rumeurs ou de fournir des renseignements à l’ennemi., Des milliers d’autres, considérés comme pro-français, ont été placés dans des camps de « détention préventive”.
Propagande
Bien que la France ne soit pas entrée en guerre spécifiquement pour reconquérir l’Alsace-Lorraine, la région est néanmoins devenue un symbole important dans la propagande de guerre française et alliée. Des affiches, des pamphlets, des chants patriotiques et des pièces de théâtre exagéraient souvent les mauvais traitements infligés par les Allemands à la région et appelaient à la « libération” des « sœurs perdues”de France., Cependant, la crainte que certains Alsaciens et Lorrains soient dangereusement pro-allemands a incité les autorités militaires françaises dans les zones occupées autour de Thann, Masevaux et Altkirch à interner les habitants dans des camps à travers le pays. Les histoires des camps ont été utilisées par les Allemands pour discréditer les Français, mais finalement l’Alsace-Lorraine n’a pas figuré dans la propagande allemande en temps de guerre.
La fin de la guerre et le Retour en France
En novembre 1918, dans le chaos de la défaite allemande, des conseils de soldats et d’ouvriers sont créés à Strasbourg, Colmar et Mulhouse., En quelques jours, ils ont été dissous, alors que les troupes françaises marchaient dans la région, sous les acclamations des habitants épuisés par des années de privation. Cet enthousiasme fut compris par les Français comme un plébiscite officieux en faveur du retour de la région à la France. Mais les défis de la réintégration des Alsaciens et des Lorrains dans la nation française s’avéreraient bien plus compliqués que prévu.,
Prise entre la France et l’Allemagne, l’expérience de la Première Guerre mondiale en Alsace-Lorraine est commémorée de manière poignante par le monument commémoratif de guerre de la place de la République à Strasbourg, dans lequel une mère endeuillée berce ses deux fils tombés au combat.
Elizabeth Vlossak, Brock University
Éditeur de la section: Mark Jones
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